Dans cet extrait publié par l’association des Amis d’Alain, Alain disait : « À quoi la générosité va tout droit ; mais l’intelligence y aide aussi, qui n’efface point les différences, et au contraire leur donne droit et charte par une observation plus attentive des conditions réelles et des structures. C’est l’abstrait souvent qui est méchant et sot. » Et, antérieurement à ce passage, il écrivit : « Non que je me refuse à voir les différences ; au contraire il me semble que je les vois, mais bien plus près de moi, en mes semblables, en mes amis ; et cela me conduit à aimer les différences, et à n’en point faire vertu ou vice« . Autrement dit : comme si souvent avec Alain, le propos est « logique », et quand il dit « À quoi la générosité va tout droit ; mais l’intelligence y aide aussi, qui n’efface point les différences », il parle de lui. Mais si le propos est logique, bienveillant, sensé, il ne prend pas au sérieux le fait/problème du racisme. Et ce parce qu’un excellent professeur de Philosophie de la fin du 19ème siècle/début du 20ème siècle pouvait vivre dans un monde dans lequel le fonctionnement social et politique empêchait encore de bien/tout voir, savoir : combien de citoyens français sis en métropole, connaissaient ce qui se passait dans les colonies ? Dans « Les Idées et les Ages« , dans le chapitre intitulé, « De la guerre », Alain écrit : « Toutefois les choses ne sont pas si simples, et l’on a vu assez souvent, on voit surtout aujourd’hui, le peuple riche, au contraire, se jeter sur le pauvre. Et dans ce cas-là, il est remarquable que le riche impose ici non pas son bon plaisir, d’après une force supérieure, mais plutôt le droit des échanges, qui lui suffit, et qui est, en quelque sorte, l’instrument propre du riche. C’est ainsi que nous colonisons, et que, vraisemblablement, on a toujours colonisé. Et il faudrait voir si la résistance des peuples pauvres vient de ce qu’ils se sentent encore plus pauvres sous ce régime nouveau, ou si cette résistance n’est pas principalement politique. Au sujet du Maroc, il faut dire si les rebelles défendent leurs biens propres et leur propre travail, ou si ce ne sont pas plutôt les politiques qui défendent par les armes le pouvoir qu’ils avaient sur les biens et le travail d’autrui. Il est à propos de rappeler ici que de meilleurs moyens de faire servir les choses à notre usage ont pour effet d’enrichir tous ceux qui s’en servent, par le seul jeu des échanges. » Hélas, cet extrait démontre qu’Alain n’a pas vraiment travaillé ce sujet, parce que, même s’il identifie, clairement et logiquement, la colonisation, par l’intention/action économique de l’appropriation, il généralise, « on a toujours… », et il n’analyse pas plus, d’autant qu’il n’a pas l’expérience de la colonisation. Il ne s’agit pas ici d’exprimer une critique sur et contre Alain qui, partant de ce constat, de la limite de sa réflexion, impliquerait une condamnation de – notamment parce que Alain a eu le mérite de résister au fanatisme nationaliste, parce qu’il a su distinguer entre droite et gauche, quand certains aujourd’hui ont complètement perdu cette capacité à, parce qu’il s’est opposé au virilisme militariste, une « pensée à genoux », mais il faut constater qu’Alain ne parvient pas à aller au-delà, pas aidé en cela par une France, déjà, verrouillée à double tour, par les héritiers des Versaillais, lesquels n’ont pas hésité à envoyer à la mort des centaines de milliers de jeunes citoyens français, entre 1914 et 1918. Quand il évoque le Maroc, il faut constater qu’il ne connaît de la situation que ce que les journaux de l’époque en disaient, et la presse d’alors était massivement et horriblement nationaliste, et même raciste. Or, sur ce sujet, Alain, même « superficiel », se situe déjà sur les bases, élémentaires – mais d’autres ne les avaient même pas. Et, en effet, comme le démontre « Racisme social… », « »C’est l’abstrait souvent qui est méchant et sot », le racisme aura été l’oeuvre d’une intelligentsia, contradictoire, à la dérive, ontologiquement sophistique.
Il y a trois sites de ressources concernant Alain, sa vie, son oeuvre :
Le troisième site peut être trouvé aisément. Il n’est plus mis à jour, et il semble que toute mise à jour, contrôle de, soit impossible.
Mise à jour de la note, le 19 juillet 2025.
Pierre Heudier, vice-président de « l’association des Amis d’Alain« , nous a adressé ces documents, ci-dessous. Nous l’en remercions, vivement. Alain, comme il le dit, « ne pense pas volontiers au problème des races. Ce genre de pensée a quelque chose d’injurieux. ». Pourquoi ? Parce que, « Comme de décider si un homme est intelligent ou non, vaniteux ou non, courageux ou non. Cela tente, mais il y faut résister. Non que je me refuse à voir les différences ; au contraire il me semble que je les vois, mais bien plus près de moi, en mes semblables, en mes amis ; et cela me conduit à aimer les différences, et à n’en point faire vertu ou vice. » : ce que le racisme ne nie pas, mais entend hiérarchiser, pour, à priori, valoriser les uns, dévaloriser les autres, il ne peut l’accepter, puisque cela reviendrait à considérer qu’un homme est, seulement, définitivement, intelligent ou non. Si son propos est simple, fondamental, rigoureux, il est certain aussi qu’il ne peut suffire à penser le racisme, la croyance et les doctrines sur les races. Parce qu’un penseur ne peut tout penser, tout comprendre. AU MOINS, LUI, Alain, il dit ce qui est, fondamental, décisif.
Ce qu’un Michel Onfray, phraseur rasoir d’une chaîne abominable, ne sait plus. Gourou pour secte de boomers, il a osé diffamer Alain. Comme il est ici rappelé en fin de document,
« – Alain est dreyfusard : « Quand il fut évident que les grands chefs s’honoraient presque d’une erreur, et en tiraient occasion de nous rappeler qu’ils nous gouvernaient, je me jetai dans la révolte, et je rattrapai mes amis dreyfusards. » (Histoire de mes pensées, Alain, 1934)
– Alain, jeune retraité, adresse en 1934 son soutien à la Ligue contre l’antisémitisme : « tout librement et joyeusement je vous envoie l’adhésion de mon esprit »
(Lettre à Bernard Lecache du 3 avril 1934, citée par A. Sernin dans Alain, un sage dans la cité, p 329)
– Alain, en 1934, est un de trois fondateurs du Comité de Vigilance de Intellectuels antifascistes
– Alain fut-il aveuglé par son pacifisme et attentiste face à Hitler ? :
« Quand je dis qu’Hitler est un de ces grands chefs, entendez bien que je plains les peuples qui ont de tels chefs, et aussi leurs voisins. Ces orages oratoires préparent la récolte des croix de bois. À mesure qu’il dit : « Allemagne, lève-toi », je vois des armées de morts qui se couchent. »
(Propos du 10 avril 1936, à rapprocher de cette ligne du Journal inédit à la date du 2 août 1940 :
« la violence hitlérienne m’a toujours révolté »)
Alain s’interroge, analyse, argumente. Michel Onfray a perdu de vue depuis bien longtemps les obligations philosophiques élémentaires. Hélas pour lui, dès qu’il ne sera plus là, il sera vite oublié, il ne sera plus lu, alors qu’Alain l’est encore, et peut être cité, avec sens et honneur, partout, notamment dans les écoles. Quel propos de Michel Onfray pourrait être cité et commenté ?!
« Contre Onfray » ? Un ancien adepte de, a guéri de son hypnose : Alain Jugnon est l’auteur de cet ainsi titré, et ainsi présenté
« CONTRE ONFRAY
Comment comprendre et penser la dérive rapide et très droitière d’un certain nombre de penseurs se réclamant hier encore de la gauche ? Celle d’Onfray, dans le cas présent ? Comme un opportunisme ? Comme l’effet d’un ressentiment ? Ou comme celui de la confusion d’une œuvre enfin rendue clairement apparente ? Alain Jugnon, qui connaît bien celle de Michel Onfray, répond ici dans cet essai polémique virulent et drôle.
Contre Onfray est un essai critique écrit à la première personne du singulier. Publiant Contre Onfray, le philosophe qu’est Alain Jugnon n’écrit pas contre quelqu’un. Par contre, il déconstruit un mouvement général des idées qui, à l’époque du nihilisme et de la détresse de tous, cherche à ne plus analyser, ne plus comprendre et surtout ne plus savoir.
Cet essai critique prend naissance dans le commentaire suivant de Guy Debord : « Le gouvernement du spectacle, qui à présent détient tous les moyens de falsifier l’ensemble de la production aussi bien que de la perception, est maître absolu des souvenirs comme il est maître incontrôlé des projets qui façonnent le plus lointain avenir. Il règne partout seul ; il exécute ses jugements sommaires. » Contre Onfray démontre qu’il y a un homme seul au cœur du Spectacle ; ses jugements sont sommaires et grossiers, mais c’est comme toujours la pensée contemporaine qui est exécutée sur les plateaux de télévision.
Dans cet essai polémique, ce qui est écrit et détaillé est fait pour refuser le personnage qui se nomme lui-même « le philosophe Michel Onfray », pour dénoncer ce mensonge spectaculaire et cette tricherie bien intégrée. Mais ce n’est pas un livre contre un homme, car il sera d’abord fait pour que vive demain encore la philosophie et pour en finir avec ce passage à l’acte postmoderne qui veut rendre la pensée honteuse d’elle-même, et ce dans la posture maladive d’une critique bête de l’humanisme et de sa valeur juste humaine, très humaine.
L’esprit du temps est à la confusion des esprits et à l’émotion des corps : Michel Onfray en oubliant qu’il fut philosophe est devenu (depuis son livre contre Freud, dans lequel il refusait à la psychanalyse le droit de savoir quoi que ce soit sur son Moi – ce fut sa thérapie) le penseur officiel et écrivain public de cette confusion générale et de cette mascarade adorée qui consiste à faire passer pour des pensées des idées multimédiatiques et d’abord idéologiquement dominantes.
Onfray de fait n’est plus nietzschéen et c’est ce qu’il fallait à Alain Jugnon démontrer, ni « de gauche » comme il le croyait, ni un nietzschéen pour la droite comme il le voudrait, il est devenu le fossoyeur de la pensée critique contemporaine. C’est la démocratie et l’humanisme qui s’éclipsent ainsi avec son dernier livre, pris dans l’aspiration droitière et siphonnés avec l’eau du bain de ses mauvaises pensées d’intellectuel célèbre et à la sagesse publique : Onfray est le penseur nouveau de la future nouvelle droite française ; cette conversion se donne à voir dans Cosmos, son dernier livre, sous forme d’un jeu de rôles et de passages à l’acte de la pensée fort peu logiques mais totalement anarchiques (au sens bien sûr non politique du terme).
Cet essai de généalogie de la non-pensée onfrayenne relit méthodiquement les écrits du philosophe en regardant de près le travail en négatif de cette conversion : les trahisons du lecteur Michel Onfray sont multiples et ce livre en repère la plupart. Ce sont les contresens de Michel Onfray : au sujet de Foucault, de Lacoue-Labarthe, des poètes en général et de Nietzsche, essentiellement. Ces trahisons sont à chaque occurrence un nihilisme politique à l’œuvre, une fausse parole mise en actes de langage.
Il y a au travail chez Onfray une fausse écriture philosophique (et écriture du faux en philosophie) qui renie tout en bloc, pour son propre plaisir, pour s’émouvoir de sa propre jouissance : ce qu’il nomme un hédonisme et qui a tout d’un dandysme assez pathétique. »
